Mise en œuvre de l’APC : Réflexions d’une ancienne directrice de programme

Le 26 juin 2022 | Auteur : Billet d'invité
Lecture de 3 min

Par la Dre Adelle R. Atkinson, FRCPC

Atkinson
Adelle R. Atkinson, MD, FRCPC, l’Université de Toronto

 

Pendant 15 ans, j’ai eu le privilège d’être la directrice d’un grand programme de formation en pédiatrie. Lorsque j’ai quitté le poste récemment, on m’a demandé de réfléchir à mon expérience de mise en œuvre de l’approche par compétences en formation médicale (APC) – la plus grande initiative de gestion du changement que j’ai connue.

Par nécessité, les directeurs de programme doivent être doués pour régler les problèmes. Ce que j’aime dans ce rôle, c’est la possibilité d’encadrer, de guider et de soutenir nos résidents afin de célébrer également leurs réussites. Je crois en l’APC et en ses avantages pour les patients et les apprenants. Le processus de conception d’un programme de développement de l’apprentissage fondé sur des compétences accolées à des expériences de formation et soutenu par un processus complet d’évaluation produira, je crois, des spécialistes compétents capables de fournir des soins complets à une population diversifiée de patients. Mais le défi consiste à mettre cette conception en œuvre dans nos programmes.

Quel conseil donnerais-je dans une conversation informelle devant une tasse de café?

Le fait de participer à la mise en œuvre à l’échelle locale et nationale de l’APC m’a permis de réfléchir différemment à la manière de soutenir nos apprenants dans leur parcours. Bien qu’il soit difficile de résumer un changement aussi radical en quelques points, j’ai retenu trois éléments sur lesquels j’aimerais vraiment me concentrer – mes leçons apprises, si vous voulez – à savoir favoriser un état d’esprit de développement, perfectionner le corps professoral et aider les résidents à se développer.

J’espère que ces enseignements sauront retenir votre attention au moment de concevoir une stratégie de mise en œuvre et de nous engager tous dans ce changement monumental.

Mentalité de perfectionnement : pas seulement pour les apprenants

Les personnes qui pensent qu’elles peuvent développer de nouveaux talents (grâce à un travail acharné, à de bonnes stratégies et à l’apport des autres) ont une mentalité de perfectionnement, contrairement à celles qui ont un état d’esprit plus fixe (qui pensent que leurs talents sont des dons innés).

À l’heure actuelle, cette idée de favoriser une mentalité de perfectionnement chez nos apprenants revient souvent dans les conversations dans le contexte de l’éducation médicale. Il s’agit certainement d’un élément essentiel au succès de l’APC, car il permet à l’apprenant d’accepter le processus de rétroaction et d’encadrement, et d’être prévoyant, avec le mentorat, en ce qui touche sa trajectoire d’apprentissage et son perfectionnement. Mais il ne suffit pas de nourrir cet état d’esprit chez nos apprenants; en tant que dirigeants, nous devons donner l’exemple d’une mentalité de perfectionnement, tout comme nos comités de compétence, la direction de nos hôpitaux et départements, ainsi que nos systèmes. Ce n’est qu’à partir de là que seront tangibles, dans notre contexte, les avantages d’un tel état d’esprit, et le fait de s’autoriser à être vulnérable (Sawatsky et coll.).

Perfectionnement du corps professoral : de la compréhension à la participation

Le perfectionnement du corps professoral a toujours fait partie intégrante de toute stratégie de mise en œuvre de l’APC, et je dirais même qu’il peut représenter la clé du succès. Il existe différents niveaux et types de perfectionnement professoral, par exemple pour la direction de l’hôpital ou du département, les éducateurs ou les enseignants en première ligne. Nous devons veiller à ce que tout le monde comprenne les objectifs de l’APC, ses répercussions, et en quoi elle est différente de ce que nous faisions jusqu’à présent. Nous devons également introduire de nouveaux concepts et un nouveau vocabulaire.

Il est essentiel de mobiliser notre corps professoral pour cette démarche. Il ne suffit pas que nos enseignants assistent à une rencontre et qu’ils comprennent ce que nous essayons de faire : il faut qu’ils y adhèrent et qu’ils s’associent à nous, surtout dans le contexte de l’évaluation en milieu de travail, où ils fourniront une rétroaction et un encadrement inestimables qui aideront nos apprenants à progresser et, en fin de compte, à développer leurs compétences. Il est important que le corps professoral s’associe aux résidents pour susciter les situations de rétroaction et de coaching. Lorsque les résidents en prennent toujours l’initiative, il peut survenir des conséquences imprévues, comme la fatigue liée à l’évaluation, la dépendance à l’égard de certains évaluateurs ou l’évitement de ceux-ci, et l’anxiété.

Des stratégies bien planifiées de perfectionnement continu des enseignants peuvent contribuer à atténuer ces problèmes :

  • partir de l’expérience – donner des exemples réels de cas où l’APC a fonctionné dans le programme, rendre le tout pertinent pour eux;
  • organiser une compétition amicale – leur faire savoir où ils se situent par rapport aux attentes de l’APC, en comparaison d’un groupe plus important de professeurs;
  • les encourager à susciter des situations de coaching et de rétroaction, en expliquant pourquoi les résidents ne doivent pas toujours en prendre l’initiative – les enseignants sont les experts du contenu;
  • faire des vérifications régulières pour entendre leurs commentaires sur le processus et y donner suite;
  • simplifier le processus – en créant par exemple un code QR qu’ils peuvent scanner pour accéder directement à l’information pertinente, comme les activités professionnelles confiables ou la plateforme d’évaluation;
  • favoriser une mentalité de perfectionnement.

Développement des résidents : les expériences pratiques aident à consolider l’information

Tout comme pour le corps professoral, la préparation des résidents par l’intermédiaire d’un programme de développement intentionnel est primordiale pour une mise en œuvre réussie de l’APC. Lorsque les résidents amorcent le programme, il est opportun d’offrir une séance sur mesure d’orientation sur l’APC qui couvre les avantages pour nos patients mais aussi pour leurs apprentissages. Elle donnera également un aperçu détaillé de ce que sera le programme pour eux, et quelles seront leurs responsabilités, encore une fois en détail, en ce qui concerne la participation active au processus. Cependant, j’ai appris que ce n’est pas suffisant. Bien que l’APC ait un sens pour eux à ce moment-là, ils n’ont pas d’expériences pratiques leur permettant de consolider l’information. (Bien sûr, l’étape d’orientation survient lors d’une période très occupée, avec une surcharge d’information, alors qu’ils essaient de savoir où obtenir leur insigne d’identification et où se trouvent les chambres de garde!)

Les résidents ont besoin d’un développement bien planifié et continu :

  • procéder à des vérifications régulières et fréquentes pour voir comment les choses progressent et pour identifier les questions et les problèmes auxquels il est possible de répondre en temps réel – surtout au début;
  • effectuer des mises à jour fréquentes sur leurs progrès tandis qu’il reste du temps pour rattraper leur retard;
  • proposer des conseils pour les aider à repérer les expériences utiles et pertinentes qui sont liées aux compétences;
  • proposer des conseils pour collaborer avec le corps professoral en signalant ce dont ils ont besoin;
  • assurer la transparence du processus (dans une optique de collaboration);
  • favoriser une mentalité de perfectionnement.

Bon, la pause-café est terminée, du moins pour l’instant. Mais l’apprentissage de la mise en œuvre réussie de l’APC se poursuit. Il est primordial que nous intégrions fidèlement l’APC tout en veillant à ce qu’elle apporte une valeur ajoutée à nos systèmes de formation médicale, surtout pour nos apprenants et nos patients.

Bibliographie
Sawatsky, Adam P., MD, MS, Brandon M. Huffman, MD, et Frederic W. Hafferty, PhD. « Coaching Versus Competency to Facilitate Professional Identity Formation », Academic Medicine, vol. 95, no 10, octobre 2020, p. 1511‑1514 doi : 10.1097/ACM.0000000000003144
À propos de l’auteure : Adelle R. Atkinson, MD, FRCPC, est professeure de pédiatrie à l’Université de Toronto et directrice associée de l’éducation au département de pédiatrie. Elle est éducatrice clinicienne au Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada.

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