D’une enfance difficile à la présidence de Doctors of BC : mon improbable parcours en médecine
Par Dr Matthew Chow
Dans cet article :
- Réflexion personnelle du Dr Chow liée à son parcours en médecine l’ayant mené à sa spécialité en psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent.
- Comment le Dr Chow a lutté contre le syndrome de l’imposteur afin d’accepter un poste de leadership d’envergure pendant la pandémie.
- Ce qui compte le plus pour lui et un mot d’encouragement à tous.
J’ai récemment reçu un message du Collège royal pour souligner mes 10 ans en tant qu’Associé. Ce message m’a amené à réfléchir à mon parcours improbable, que je souhaite partager dans l’espoir d’aider une personne qui doute de ses capacités ou qui pense ne pas avoir ce qu’il faut pour occuper un poste de leadership.
J’ai dirigé Doctors of BC en tant que président (2020-2021) durant une année caractérisée par plusieurs vagues de COVID-19, un nombre record de décès par surdose, des centaines de décès en raison d’une vague de chaleur et des incendies de forêt qui ont rayé une communauté entière de la surface de la Terre. Pour couronner mon mandat, nous devons maintenant affronter de nombreuses années de travaux de reconstruction en raison d’inondations catastrophiques ayant isolé certaines parties de la province du reste du Canada.
Je ne suis probablement pas le « leader solide affrontant une crise exceptionnelle » que vous vous imaginez. D’une part, j’ai été élu à l’âge de 36 ans – très tôt dans ma carrière. Je suis un spécialiste de la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent – une très petite communauté de pratique. Les Canadiens qui me ressemblent n’ont obtenu le droit de vote que peu de temps avant la naissance de mon père. Ma propre enfance a été difficile. Par conséquent, j’étais un enfant timide, un peu maladroit socialement et terrifié à l’idée de parler en public. Je continue à ce jour de souffrir du syndrome de l’imposteur.
Devenir un médecin, puis un leader n’était certainement pas le parcours que j’aurais pensé emprunter.

Dr Matthew Chow (fournie par le Dr Chow, crédit photo : Bill Hawley)
Trouver la paix intérieure dans une spécialité inattendue
Mes parents ont fait de leur mieux, mais étaient eux aussi un peu blessés. Les travaux scolaires étaient mon échappatoire. Je m’y suis consacré si intensément que j’ai pu intégrer les études en médecine à 20 ans. J’ai ensuite envisagé bon nombre de spécialités que je considérais comme analytiques : soins intensifs, radiologie, oncologie, même la médecine d’urgence et la médecine de famille.
Ce n’est qu’à la fin de mon programme d’externat, lorsque le CaRMS était sur le point de commencer, que j’ai effectué mon stage obligatoire en psychiatrie. C’était le stage dont je voulais me débarrasser – je ne m’en cache pas – mais quelque chose de magique s’est produit.
On m’a affecté à la clinique de psychothérapie externe. C’était mon pire cauchemar… on m’éloignait des élégants systèmes, des nombres et de l’anatomie avec lesquels j’étais à l’aise. Or, je m’y suis senti comme à la maison. J’ai trouvé la paix. J’avais enfin le temps d’écouter mes patients me raconter leur histoire. Je ne tentais pas d’intervenir ou de résoudre leurs problèmes, car je ne possédais pas la capacité ou la compréhension requise pour le faire. Je les ai simplement écoutés et soutenus. C’est ainsi que j’ai acquis l’une des plus importantes compétences qui soient, une compétence qui m’aide encore à ce jour : écouter sans jugement.
Notre doyen associé était totalement stupéfait quand je suis entré dans son bureau pour lui dire que je souhaitais m’inscrire au programme de psychiatrie. Mes collègues commençaient déjà leurs processus d’entrevue. Or, il m’a aidé avec tous mes stages restants et a rédigé ce que je soupçonne être une excellente lettre du doyen; et je suis maintenant psychiatre.
Lutter contre le syndrome de l’imposteur
La psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent m’attirait, car elle me permettrait d’aider les enfants et leurs familles avant que la situation ne s’aggrave – ce qui fait probablement écho à ma propre enfance.
J’ai été chanceux de recevoir une lettre de convocation à l’hôpital pour enfants de notre province au terme du programme de résidence. J’ai beaucoup joué et bricolé avec les ordinateurs depuis l’âge de 10 ans; cette expérience m’a aidé à lancer un nouveau programme de cliniques de sensibilisation et de télémédecine – un programme qui s’est heurté à la résistance de détracteurs, mais qui fut ultimement justifié dès les premières semaines de la pandémie, près d’une décennie plus tard.
Au fil de ce parcours, j’ai rencontré ma partenaire de vie et nous avons eu une fille ensemble. J’ai pris congé après sa naissance, et lors d’une période d’ennui profond (ou était-ce plutôt le manque de sommeil?), je me suis inscrit à un court séminaire sur le leadership pour les médecins. Pendant ces cours, j’ai rencontré des personnes qui sont devenues des amis, des mentors et des complices indéfectibles. Ils m’ont convaincu de présenter ma candidature pour toute possibilité de siéger aux comités de notre association médicale provinciale. J’ai intégré l’un des comités, puis j’ai commencé à accepter toutes les tâches que je pouvais. J’ai accepté certaines tâches peu enviables (une fois, j’ai dû trouver une façon de limiter les coûts excédentaires dans le budget des honoraires incitatifs des médecins); mais cela m’a permis d’acquérir beaucoup d’expérience.
Quelques années plus tard, quelqu’un m’a suggéré de me présenter à la présidence de Doctors of BC. Je n’avais jamais gagné d’élection. Comme par le passé, fidèle à moi-même, j’ai plongé tête première dans la campagne tout en continuant de lutter contre le syndrome de l’imposteur.
À ma grande surprise, et avec grand honneur, j’ai été élu.

Dr Matthew Chow (fournie par le Dr Chow, crédit photo : Jimmy Jeong)
Les hauts et les bas de la prise de parole
Il n’y a pas si longtemps, j’ai rédigé un éditorial sur l’importance de la vaccination contre la COVID-19 chez les 5-11 ans. Le texte a été publié à l’échelle de la province, cité par le premier ministre et intégré aux documents officiels de sensibilisation en matière de santé publique. J’ai réalisé près d’une centaine d’entrevues avec les médias, dirigé des séances de discussion ouverte avec des milliers de participants et rencontré de nombreux médecins, représentants officiels du gouvernement et dirigeants communautaires.
J’ai aussi reçu ma juste part de courrier haineux. Certaines personnes ont cessé de me parler, car je défendais les mesures de santé publique. J’ai dû affronter la furie de certains collègues pour avoir fait progresser certaines politiques ou pris des décisions qui les touchaient.
Mais j’ai reçu beaucoup plus de bons mots, de gentillesse, de respect et de gratitude. Un médecin a apprécié mon sens de la diplomatie. Un autre médecin, le soutien que j’ai accordé à des collègues à bout. Pour d’autres, c’était mon calme en temps de crise. Bon nombre de médecins m’ont décrit comme l’un des meilleurs présidents qu’ils avaient rencontrés au cours de leur carrière s’échelonnant sur plusieurs décennies.
Pas si mal pour un enfant timide! Un enfant dans une spécialité qui est parfois stigmatisée, tout comme les patients que nous soignons. Un enfant qui n’avait jamais vu une personne comme lui dans les photos des présidents antérieurs.
Découvrir ce qui importe le plus
Lorsque je réfléchis aux dix dernières années, je suis étonné de tout ce que j’ai accompli grâce à l’ardeur au travail, au soutien des amis et des collègues et à l’ouverture aux différentes possibilités.
J’ai occupé un poste de leadership d’envergure durant une pandémie.
J’ai rencontré des personnes que l’on voit tous les jours aux bulletins de nouvelles; et j’ai collaboré avec elles.
J’ai représenté ma spécialité sur une grande scène.
Vous savez ce qui m’importait le plus?
Enseigner à ma fille comment monter à vélo pour la première fois.
Écouter un groupe d’intensivistes parler de leurs actes quotidiens d’héroïsme.
Verser quelques larmes avec une communauté de médecins en milieu rural.
Rassurer un voisin terrifié quant à la suite des choses.
Autrement dit, ce qui m’importait le plus était simplement d’être humain et de permettre aux autres d’être humains avec moi. Notre parcours. Écouter sans jugement. Voilà ce qui était important.
Je souhaite terminer mon histoire en vous rappelant que vous êtes suffisant. Même si vous éprouvez de la fatigue, de la frustration, de la colère, de la peine ou un bouleversement – vous avez fait de votre mieux.
Je me suis aussi senti terrifié à quelques reprises. Confus. Entièrement incertain de la marche à suivre. J’ai continué à mettre un pied devant l’autre. J’ai continué à écouter les autres. À être humain, tout simplement.
Voici mon histoire. Peut-être est-ce la vôtre aussi?
Matthew Chow, MD, FRCPC, est un psychiatre de l’enfant et de l’adolescent à Vancouver (Colombie-Britannique). Il a récemment terminé son mandat d’un an en tant que président de Doctors of BC (2020-2021). Suivez-le sur Twitter @DrMattChow