Dre Angela Enright, championne de la sécurité chirurgicale, lauréate de notre Prix Teasdale-Corti 2019

Le 19 août 2019 | Auteur : Personnel du Collège royal
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Ici comme ailleurs, les éloges fusent à l’égard d’Angela Enright, OC, MBBCh, FRCPC, anesthésiologiste en Colombie-Britannique, qui s’est employée à rendre l’anesthésie accessible et sécuritaire dans les pays à faible revenu. Elle est « sans contredit la plus exceptionnelle figure du panthéon des anesthésiologistes canadiens à avoir exercé une influence sur la santé mondiale », reconnaît Douglas DuVal, MD, FRCPC, président sortant de la Société canadienne des anesthésiologistes (SCA).

C’est donc pour son engagement et les succès qu’elle a connus dans l’amélioration de la sécurité chirurgicale partout dans le monde que le Collège royal lui décerne cette année le Prix Teasdale-Corti d’action humanitaire.

Un nouveau programme de formation pour mettre fin à l’exode des cerveaux au Rwanda

Pendant des années, la Dre Enright a offert des programmes de formation et d’éducation aux anesthésiologistes et autres professionnels de la santé du monde entier par l’entremise de la Fondation d’éducation internationale de la SCA. Ses activités l’ont plus tard menée au Rwanda, où les récents succès de la fondation au Népal avaient suscité l’intérêt du gouvernement.

Le Rwanda envoyait des médecins en France et en Belgique afin qu’ils suivent une formation en anesthésiologie, mais beaucoup d’entre eux décidaient d’y rester, ou ne revenaient que brièvement. Il fallait trouver une solution car, à l’époque, il n’y avait qu’un seul anesthésiologiste pour desservir les neuf millions d’habitants.

« Je m’y suis donc rendue en 2004 pour voir en quoi je pouvais être utile, relate la Dre Enright. Avec l’aide de l’université et du gouvernement, nous avons mis sur pied un programme similaire à celui du Népal. »

Toujours en vigueur aujourd’hui, ce programme envoie des anesthésiologistes passer un mois au Rwanda comme enseignants bénévoles. On compte désormais 18 anesthésiologistes exerçant au Rwanda, et de nombreux résidents sont en formation.

Entre-temps, la Dre Enright a participé au rayonnement de la SCA dans d’autres pays à faible revenu, notamment au Burkina-Faso.

La Dre Enright (centre) en compagnie du Dr Cheik Bougouma et de la Dre Bertille Ki, deux anesthésistes vedettes du Burkina-Faso.

La Dre Enright (centre) en compagnie du Dr Cheik Bougouma et de la Dre Bertille Ki, deux anesthésistes vedettes du Burkina-Faso.

Liste de contrôle de la sécurité chirurgicale de l’OMS

En 2008, la Dre Enright a joint un groupe de chirurgiens et d’anesthésiologistes qui a collaboré à la création d’une liste de contrôle de la sécurité chirurgicale avec l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

« Cette liste est surtout axée sur la communication, confie-t-elle. La communication entre les chirurgiens, les anesthésiologistes, le personnel infirmier — tous les membres de l’équipe — parce qu’une bonne communication permet d’éviter les erreurs ».

Et elle n’avait pas tort. Une analyse de la liste de contrôle a révélé une baisse marquée des taux de mortalité et de morbidité, tant dans les pays à revenu élevé que dans les pays à faible revenu. Mais ce n’était pas suffisant.

Vinrent ensuite les oxymètres peu coûteux.

Oxymètre développé par la Lifebox Foundation.

Oxymètre développé par la Lifebox Foundation.

Des oxymètres offerts par la LifeBox Foundation

L’oxymètre est un petit appareil qui mesure la concentration en oxygène dans le sang des patients. Le son qu’il émet passe de la gamme soprano aux basses profondes lorsque la concentration d’oxygène diminue. Cet appareil a fait son apparition au Canada et dans d’autres pays vers 1980 mais en raison de son coût (1500 $ CA), quelque 80 000 salles d’opération réparties dans le monde n’avaient toujours pas accès à cette technologie en 2008, année où l’OMS a créé sa liste de contrôle de la sécurité chirurgicale.

La Dre Enright présidait alors la World Federation of Societies of Anaesthesiologists. Cette organisation a établi un partenariat avec l’Association of Anaesthetists of Great Britain and Ireland, ainsi qu’avec le Brigham & Women’s Hospital et l’Université Harvard afin de « mettre au point un oxymètre peu coûteux, hautement efficace et résilient à l’intention des pays à faible revenu ».

Cette première démarche a porté fruits mais le groupe a vite réalisé qu’une fondation s’imposait pour la suite. « C’est pourquoi nous avons fondé la LifeBox Foundation », explique la Dre Enright, qui remercie la SCA pour son généreux appui malgré les défis constants liés au financement. « Nous avons maintenant distribué plus de 20 000 oxymètres dans plus de 100 pays et nous avons montré aux gens à les utiliser. »

La Dre Enright en compagnie de participants au cours sur l’oxymètre au Burkina-Faso.

La Dre Enright en compagnie de participants au cours sur l’oxymètre au Burkina-Faso.

Retenir l’attention et mesurer les actions à l’échelle mondiale

Même si les problèmes chirurgicaux causent plus de décès que le VIH, le SIDA et la tuberculose combinés, il est souvent très difficile d’obtenir du financement pour trouver des solutions.

Lorsque The Lancet a mis sur pied sa commission sur la chirurgie générale en 2014 pour sensibiliser le monde à la sécurité des chirurgies, le moment est venu de relancer le projet de l’OMS sur la chirurgie et l’anesthésiologie.

« Après des années de vaines tentatives, la chirurgie, l’anesthésiologie et l’obstétrique ont enfin fait front commun et convaincu l’OMS de prendre en compte ces disciplines, vu l’importance de leur rôle dans les soins de santé. Ce fut une décision marquante », ajoute la Dre Enright.

Le financement amène les données.

Contrairement aux taux de mortalité maternelle et néonatale qui font l’objet d’un suivi par pays, « personne ne recueille les taux de mortalité associés à la chirurgie, précise la Dre Enright. Nous devons le faire car nous ne pourrons jamais améliorer quelque chose que l’on ne peut mesurer ».

Selon elle, la mise en place de systèmes visant à réduire les taux de mortalité coûtera des milliards de dollars. « Mais ce chiffre sera de l’ordre des billions si nous ne faisons rien », ajoute-t-elle.

« J’ai toujours cru que les sources d’argent sont inépuisables; tout dépend où l’on souhaite le dépenser ».

Originaire de Dublin, en Irlande, la Dre Enright a suivi une formation en anesthésiologie à Calgary, en Alberta, puis elle a exercé à Saskatoon (Sask.) et à Victoria (C.-B.) avant de prendre sa retraite de la pratique clinique en 2015.


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